Humanisme pur

Le désir du non-désir

Une démarche

Le comportement humain ordinaire est déterminé par le désir et la peur. Je désire obtenir ce qui m’est agréable, éviter ce qui m’est désagréable. Je désire réussir, j’ai peur d’échouer.
La plupart des spiritualités invitent à dépasser le désir et la peur, elles invitent à un certain détachement.
On pense souvent que cela conduit à une sorte de dévitalisation, d’apathie… à tort. Paradoxalement, cette pratique conduit à une vitalité et un bonheur supérieurs, et surtout, plus satisfaisants sur le long terme. Car en réalité, on ne supprime pas ainsi tous les désirs. Tous tendent à disparaître sauf un, lequel se renforce en récoltant l’énergie ainsi libérée.
Cette unicité fait que notre vie devient plus cohérente et sensée. En effet, parmi la multitude des désirs immédiats et contingents, certains sont contradictoires entre eux. De plus, beaucoup conduisent à des situations de souffrance ultérieure.
Mieux encore : ce désir unique est le même pour tout le monde : pour tous ceux qui pratiquent cet exercice. De sorte qu’il n’y a plus de contradictions entre les désirs des uns et des autres : l’harmonie est réalisée non-seulement en chacun, mais aussi entre tous !

Il ne s’agit donc pas d’atteindre, en fin de compte, un état de non-désir, mais un état de satisfaction profonde et définitive. Il ne s’agit pas d’atteindre un état d’apathie, mais bien au contraire, d’avoir de solides raisons d’agir, d’agir de façon sensée et cohérente, là où notre vie n’était qu’agitation et dispersion.
On s’accroche d’ordinaire à nos désirs contingents parce que, en tant que désirs, ils nous subjuguent, mais aussi parce que l’on voit d’abord ce que leur disparition nous ferait perdre, pas ce qu’elle nous ferait gagner… La clé de la libération de ce bourbier est donc la dépression pour mieux revivre, la prise de distance par rapport à soi-même pour mieux se retrouver. Il y a en chacun d’entre nous ce désir d’aller au-delà du désir, cette quête de sens. C’est la clé. Il suffit de l’utiliser.
Cette maturation individuelle passe par un travail sur soi-même, intérieur. L’extérieur est précisément ce qui nous aveugle.

Un but

Quel est donc ce désir unique et fédérateur, au-delà de la contingence ?
Ce désir peut prendre la forme de l’aspiration au bien, de la recherche de valeurs. Mais le bien comme les valeurs peuvent eux-mêmes être des illusions, des obstacles (comme tout concept, d’ailleurs, à partir du moment où il se substitue au réel : à l’objectivement perceptible). On voit bien que diverses personnes peuvent considérer comme « bien » des choses différentes, revendiquer des valeurs différentes, ce qui pourra s’opposer à l’harmonie entre elles.
Une définition plus satisfaisante de ce désir, parce que plus précise et objective est « le bonheur ». Le bonheur défini comme une satisfaction durable et complète (puisque, bien-entendu, celui que subjuguent les désirs contingents ne manquera pas de qualifier toute satisfaction intense de « bonheur »)... Mais le bonheur de qui ? et à quel prix ?
Une définition plus satisfaisante s’impose : « le plus grand bonheur possible du plus grand nombre possible ».
Elle définit une direction à l’action, et non pas un objectif qui serait susceptible d’être atteint. C’est bien ce qu’il nous faut : ce désir donne à sa vie un sens, qui ne risque pas de devenir caduc.
Quant aux moyens d’influencer autrui dans le sens de son bonheur, celui qui s’est libéré des désirs contingents en a une idée suffisante… Il pourra proposer le bonheur de l’amour, la félicité. Celui-ci présente l’avantage de ne rien coûter et d’être compatible avec l’harmonie entre tous. D’où son intérêt évident pour notre objectif de maximisation globale du bonheur…
Certes, on ne peut imposer le bonheur à quiconque. Ce serait une absurdité puisqu’on ne peut être pleinement heureux sous la contrainte, ni même sous l’effet d’un discours qui n’a pas été profondément compris. Certes, on ne peut être assuré que la félicité est accessible à tout le monde, même si cela est vraisemblable. Mais ce n’est pas nécessaire, une direction n’est pas un objectif... Il suffit de proposer…
On vérifie qu’un tel désir définit une direction commune, puisque le bonheur de chacun compte également. Il s’oppose à l’égoïsme, puisque personne n’est réellement lésé par la poursuite de ce bonheur. Il s’oppose à toute forme de compétition, et engendrerait, s'il était partagé, une coopération universelle.

Une méthode

Appelons "félicitisme", la mise en œuvre rationnelle de ce désir.
La plupart des spiritualités invitent à la pratique du non-désir sans détailler ce qui le suit. Elles invitent à « faire le bien » (de qui ? comment ?) ne pas tuer, mentire, médire etc. ( est-ce viable?, est-ce toujours la condition du bonheur maximum ? etc.)
Bien sûr, elles apporteraient beaucoup si elles étaient plus largement et réellement mises en pratique… mais ce n’est pas le cas (malgré des siècles et des siècles de propagande)… Leur manque de cohérence, de précision et de réalisme y est peut-être pour quelque chose…

Cette mise en œuvre rationnelle est nécessaire à l’harmonie. Car ce ne sont pas seulement les désirs et les sentiments qui divisent, ce sont aussi les dogmes, les croyances, les concepts… Ou pour être plus précis : l’imprécision des concepts et leur substitution à ce qu’ils sont censés décrire.
Un dogme est une croyance imposée par une autorité. Difficile d’arriver à un consensus véritable et universel en imposant… Une croyance est une idée sur le monde non remise en cause, voire que l’on refuse de mettre en cause. Difficile de parvenir à un consensus sans remise en cause de nos idées…
Le manque de rationalité alimente l’esprit partisan, lequel continue de diviser, même lorsque l’on a accédé à un amour universel.
La rationalité est nécessaire à la justesse du raisonnement, qui permet aux hommes d’agir efficacement, de se mettre d’accord, d’être en harmonie les uns avec les autres. Elle consiste à ne pas se contenter de croyances ou de simples associations d’idées.

La mise en œuvre de la raison et de l’amour, ou, pour être plus précis, du félicitisme, engendrerait la paix dans le monde.

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