Depuis des siècles, des réformateurs sociaux nous promettent un monde meilleur,
mais ils se heurtent à une certaine « nature humaine ». Supprimez
l’aristocratie et vous avez la bourgeoisie, supprimez la bourgeoisie et vous
avez la nomenklatura… La racine du pouvoir est en chacun d’entre-nous, mais
ne le dites pas, surtout, vous n’auriez aucune chance de vous faire élire…
Depuis des millénaires, religions et philosophies humanistes cherchent à améliorer
l’homme, mais elles se heurtent à l’environnement économique. L’homme se
gave de belles paroles le jour du prêche, mais le reste du temps, "il faut
bien vivre", et pour ce faire, qu'il le veuille ou non, il exploite son
prochain et l’environnement (de part le système économique dans lequel il
est plongé), tout en se donnant bonne conscience en allant aider les
« pauvres » ou nettoyer une plage de temps en temps.
Malheureusement, il semble que cela ne suffise pas...
Depuis des millénaires, tout concourt à favoriser l’égoïsme.
La réalité
économique d’abord, fondée sur un intérêt individuel ou clanique :
pour assurer sa sécurité ou celle de sa
famille, il
faut d’abord amasser de l’argent ou asseoir son pouvoir…
Les morales et religions ensuite, qui présentent trop souvent l’altruisme comme
un sacrifice, un héroïsme, ce qui ne tente guère que quelques assoiffés de
reconnaissance... ou comme la clef d’un hypothétique paradis, ce qui renforce
l’égocentrisme (chacun cherche son
salut) et un attachement irrationnel à des croyances, source de conflits (« l'impie
est dans l'erreur ») et de manipulations (« ceux qui mourront au combat accéderont
directement au paradis »).
Il est irréaliste d’envisager une humanité parfaitement morale et irréprochable
en toutes circonstances. Se contenter de « changer l’homme » n’est donc pas sérieux.
Il faut un environnement économique qui ne le soumette pas à la tentation, qui
soit en harmonie avec les valeurs de fraternité. Inversement, il est irréaliste
d’envisager une société sensiblement meilleure sans qu’il n’y ait une évolution
morale de l’homme, une démarche vers plus de sagesse.
Voilà pourquoi il faut "changer" les deux simultanément : l’homme et la
société. Evidemment, tout le monde l'aura compris, "changer"
signifie ici "faire évoluer dans un sens positif".
Comment parler de fraternité lorsque chacun est incité à accumuler de la
richesse en la prenant à autrui (ce qui se passe lors de toute transaction
commerciale), lorsque la concurrence est partout ? Où
est la cohérence ?
Une économie fraternelle inciterait chacun à se préoccuper du bien commun en
tant que tel…, et non par un calcul indirect visant un « intérêt
personnel ».
Ça ne semble guère réaliste… sauf si l’on commence par ceux qui auraient
accédé à une certaine conscience, et qu’on y va progressivement en commençant
en petit. Peut-être y a-t-il là l’espoir d’amorcer une logique différente ?
Vouloir "changer le monde" peut être une fuite de soi, c'est trés vrai. Mais le "travail sur soi" peut également être une fuite du monde et l'alibi de l'égotisme ou de la crainte de l'engagement.
Combien de révolutionnaires ou réformateurs politiques ont fui leurs problèmes personnels dans leur action (souvent de manière inconsciente il est vrai)! Mais l'inverse est vrai également, combien de mystiques, de chercheurs spirituels ou thérapeutiques ont fait de leur quête interieure un refuge face aux exigeances de l'engagement social, de l'engagement au monde!
Alors essayons de NE PAS FUIR, que ce soit à l'intéreur ou à l'exterieur... Je dis cela sans aucun jugement pour qui que ce soit, nous sommes toutes et tous confrontés à ces problématiques difficiles...
J'apprécie personnellement des gens comme Gandhi qui s'efforçait sans cesse de maintenir l'équilibre entre les deux dimensions de l'action, la spirituelle et la sociale. Sans idéaliser Gandhi en tant qu'homme (qui avait certainement des faiblesses et des défauts) je trouve son effort pour travailler sur lui-même tout en agissant avec force et ampleur dans la sphère politique et socio-économique, assez exemplaire.
TMDe nombreux révolutionnaires politiques pensent que l'on
doit commencer par changer radicalement la structure politique et économique;
ensuite, seconde démarche, et pratiquement nécessaire, l'esprit humain
changera à son tour: la société nouvelle, une fois établie, produira quasi
automatiquement ,un être humain nouveau. Ils ne voient pas que la nouvelle
élite, étant motivée par le même caractère que l'ancienne, aura tendance à
reproduire les conditions de l'ancienne société dans le cadre des nouvelles
institutions socio-politiques créées par la révolution; ils ne voient pas non
plus que la victoire de la révolution sonnera son glas en tant que révolution,
mais non en tant que phase historique qui préparait le terrain pour un
développement socio-économique réalisé tant bien que mal. Les révolutions
française et russe sont des exemples classiques. Il est intéressant de noter
que Lénine, qui n'avait pas cru que les traits distinctifs du caractère
jouaient un rôle important dans la fonction révolutionnaire d'un individu,
changea radicalement d'opinion pendant la dernière année de sa vie quand 'i
distingua nettement les défauts de caractère de Staline et exigea, dans son
testament, qu'en raison de ces défauts, Staline ne fût pas son successeur.
A l'opposé se situent ceux qui soutiennent que c'est d'abord la nature des
êtres humains qui doit changer - leur état d'esprit, leurs valeurs, leur
caractère - et que ce n'est qu'alors qu'une société vraiment humaine pourra
être construite. L'histoire de la race humaine leur donne tort. Le
changement purement psychique a toujours été limité à des sphères privées
et à de petites oasis, ou bien il a été totalement inefficace quand la
prédication des valeurs spirituelles se combinait avec la pratique des valeurs
opposées.
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